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10 juin 2024

Dominique Fortier - dfortier@medialo.ca

Les Piles-Poils signent un spectacle à 100 % en intelligence artificielle

ARTS DE LA SCÈNE

Piles-Poils

©Photo Gracieuseté

Les esclaves de l'intelligence artificielle au service du public du Festival d'humour émergent de Rouyn-Noranda.

Les frères Mathieu et Simon Portelance de Cap-Chat ainsi que leur troisième mousquetaire, David Morin de Coaticook signent un spectacle généré 100 % par intelligence artificielle.

Si l’exercice peut sembler périlleux à plusieurs niveaux, il s’agissait d’une expérience que le trio voulait essayer. Le plus jeune du groupe, Mathieu, avait d’ailleurs eu droit à une réaction médiatique résonnante lorsqu’il avait lancé la chanson « Tu ne sauras jamais » des B.B. interprétée par Michael Jackson. La ressemblance était à s’y méprendre.

Après avoir présenté le spectacle IA HA HA pour une première fois à Montréal, Les Piles-Poils reviennent donc à la charge en compagnie de François Doyon et Julie Fortin au Festival d’humour émergent de Rouyn-Noranda qui se déroule du 26 au 30 juin. Mais qu’est-ce qu’un spectacle généré à 100 % par intelligence artificielle?

Mathieu Portelance explique que le spectacle est divisé en plusieurs segments, qu’il s’agisse d’extraits de bulletins de nouvelles, de parodies d’émissions connues ou même de numéros de stand-up. « On demande à ChatGPT de générer les textes et en peaufine nos demandes par la suite pour y ajouter davantage de contenu personnalisé. Par la suite, on prend les meilleurs bouts des textes générés et on les remet à nos camarades de jeux à la dernière minute. Le résultat fait que personne ne sait ce qu’il jouera avant le spectacle. Nous arrivons donc sur scène avec un costume et des textes que nous n’avons jamais vu auparavant. Évidemment, on s’amuse aussi avec le fait que nous savons à qui nous voulons offrir tel ou tel sketch. Il y a un vilain plaisir à mettre des mots dans la bouche de nos camarades. »

Puisque le thème du festival de cette année est la fin du monde, ce type de spectacle s’inscrit parfaitement dans la logique. « C’est comme si les humoristes étaient maintenant tous dirigés par l’intelligence artificielle. Nous devenons ainsi de simples marionnettes au service de l’intelligence artificielle », ajoute Mathieu.

Pour ajouter au concept, toutes les images et les vidéos projetés pendant le spectacle sont également générés par intelligence artificielle. Pour les humoristes, ce type de terrain de jeu est infini. « Par exemple, on a généré des chansons où on jumèle la musique des Champs Élysées de Joe Dassin, mais sur le thème de l’épicerie Super C. C’est d’ailleurs un segment du show; un karaoké à roulette. Le membre du groupe qui devra chanter la nouvelle chanson live ne l’a jamais entendu auparavant. Il ne fait que connaître l’air de la chanson de base. »

Si le spectacle est comique et surtout absurde, il y a aussi un côté dénonciateur à la démarche dans la mesure où Les Piles-Poils voulaient tout de même agiter un drapeau rouge. Pour ces humoristes, même la créativité humaine reste et restera toujours le meilleur outil pour pondre des blagues, il y a lieu de se positionner sur la place que prend l’intelligence artificielle dans la vie et le travail de tous et chacun, spécialement s’il n’y a aucun encadrement.

Autant de travail

Certains pourraient penser que l’utilisation de l’IA peut faciliter la tâche des comédiens, mais selon Mathieu, ce n’est pas le cas. « Je dirais que ChatGPT génère beaucoup plus de contenu qui, au final, est absurde alors qu’une fois sur dix, il fera une bonne blague. Il y a donc un gros travail de peaufiner le texte, générer jusqu’à dix versions du même texte et ensuite trier le contenu pour avoir une version potable. C’est donc autant de travail que d’écrire nos propres gags, sauf que le résultat est résolument absurde et, parfois, tellement pas drôle, que c’est ce qui rend le sketch drôle », explique le jeune Cap-Chatien, mentionnant au passage que le public a intérêt à savoir ce qu’il vient voir avant le show. « Si les gens ne savent pas que c’est généré par IA, ils vont se demander quel genre de bébittes nous sommes. »

Ce qui est aussi agréable pour les jeunes humoristes est de pouvoir présenter un genre de spectacle inédit qui n’a jamais été fait auparavant. Si l’an dernier, le public montréalais a eu droit à un premier jet, cette année, les gens de Rouyn auront accès à une version revue et améliorée. « C’est différent de tout ce que nous avons présenté dans le passé. C’est aussi une expérience unique pour le public car le concept d’intelligence artificielle est quand même nouveau et on voit que ça progresse d’année en année », précise Mathieu Portelance.

Est-ce qu’il y a lieu d’avoir peur de l’IA? À cette question, l’humoriste cap-chatien ne croit pas que le modèle soit assez intelligent émotionnellement pour savoir saisir des moments et du vécu, mais il ne se cache pas la tête dans le sable non plus. Il sait que cette technologie a déjà, en quelque sorte, remplacé certains emplois et il y aura lieu de surveiller le tout de près. « Chose certaine, notre ligne directrice est de ne jamais utiliser l’intelligence artificielle autre que dans ce spectacle. C’est interdit car on veut que notre art reste humain », conclut-il.

On peut suivre l'humour et l'actualité des Piles-Poils via leur page Facebook.

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