La petite histoire d'Elmo, le chat spécial

Effectivement, le petit chaton tout noir était différent de ses frères et sœurs. Au lieu de marcher comme un félin normal, Elmo titube comme s'il avait calé quatre shooters de vodka, et ce, en permanence. Il a un trouble qui affecte son équilibre. Il est donc constamment en train de chercher à se stabiliser. Ça lui arrive également de chuter sur le côté pour aucune raison apparente. Il a aussi la tête qui vacille comme une figurine Bobblehead de P.K. Subban. De plus, puisque ce sont principalement ses pattes d'en arrière qui sont déficientes, réussir à sauter devient un exploit.

Un jour, un garçon amena Elmo  à la maison parce qu'il savait que j'avais une profonde affection (certains diront maladive) pour les petites créatures à quatre pattes. Il devait toutefois amener son frère, mais il a fait erreur puisqu'il était identique à Elmo. C'est donc Elmo qui est arrivé chez moi en titubant comme un étudiant de Cégep à la fin d'un party de mi-session.

Elmo avait clairement des besoins particuliers. Il se déplaçait difficilement et avait un sérieux besoin d'être « pimpé » puisque de toute évidence, il avait plusieurs défauts de fabrication. Je me suis donc mis à faire des recherches pour comprendre ce qui affligeait mon nouveau compagnon à quatre pattes. Je suis tombé sur un article et des vidéos de chats qui affichaient les mêmes maux qu'Elmo. Mon minou a tous les symptômes d'une hypoplasie cérébelleuse. Manque de coordination, tête tremblante et pertes d'équilibre. Heureusement, ce n'est pas une maladie mortelle ni contagieuse. Seulement un état où le cerveau est sous-développé au niveau de la coordination.

Pendant les premières semaines, j'aidais Elmo à se rendre à son bol de nourriture puis je le stimulais régulièrement avec des jouets pour chats, histoire qu'il reprenne un peu de poil de la bête. Après une semaine, il y avait déjà une différence marquée. Elmo chutait de moins en moins et, lorsqu'il se retrouvait en fâcheuse position, il se relevait lui-même, quelques secondes plus tard. De l'exercice, beaucoup, beaucoup, beaucoup de nourriture et un raz-de-marée de câlins; voilà les ingrédients miraculeux qui ont redonné à Elmo, quelques lettres de noblesse.

Un chat normal accepté de tous

J'ai déjà quelques chats chez moi. Ils sont jaloux et possessifs pour la plupart. Lorsqu'on introduit un nouveau membre de la gent féline, il est rarement accueilli avec un tapis rouge. Plutôt le contraire. Mais cette fois-ci, c'était différent. Mes minous semblaient ressentir la différence d'Elmo et l'ont tous accepté sans faire d'histoire. Pas d'agressivité, un peu de nonchalance, mais aucune réaction violente. C'est un peu comme si mes chats le prenaient en pitié.

L'adaptation à sa nouvelle demeure et à ses nouveaux compagnons de vie poilus a donc été, somme toute, sans heurt. Même chose avec ses nouveaux humains qu'il a rapidement apprivoisés.

Il faut donc s'adapter. Mettre la poubelle sur un petit tabouret pour la rendre plus difficile d'accès. Favoriser des surfaces de tapis pour faciliter ses déplacements. Accepter qu'il y ait toujours plus de nourriture à chat à côté du bol que dans le bol. Lui laisser ses griffes les plus aiguisées et ainsi apprendre à vivre avec des lacérations corporelles. Au final, Elmo est heureux dans son nouveau chez-soi. Il a une nouvelle vie. Nous sommes également heureux de l'avoir accueilli. Il apporte de l'affection, de la tendresse et aussi des fous rires.

En cette période de déménagement, alors que plusieurs propriétaires songent à simplement abandonner leur petit animal de compagnie pour n'importe quelle raison que ce soit, pensez à Elmo qui a eu une deuxième chance et qui apporte le plus grand bonheur à ses nouveaux parents. Pensez à tous ces animaux qui vont se retrouver à la rue, au froid l'hiver venu, avec tous les dangers qu'une vie sauvage implique; prédateurs, maladies, recherche de nourriture, automobiles et autres. Malheureusement, il n'existe aucun refuge en Haute-Gaspésie pour les animaux abandonnés. Le plus proche est à Matane et peine à répondre à la demande puisque ces refuges sont souvent l'œuvre d'amants des animaux qui font le tout bénévolement, comme Manon Parent à Cap-Chat, sans aide des municipalités.