Des amoureux de la nature ont agrandi les sentiers de la grotte des fées, joyaux de Saint-Léandre

« Un pur esprit s’accroît sous l’écorce des pierres ». Ce vers du poète français Gérard de Nerval pourrait sans doute illustrer les forces inhabituelles ressenties à Saint-Léandre par les promeneurs du dimanche et les randonneurs plus chevronnés, que la beauté de la grotte des fées ne laisse pas impassibles. Située au cœur de 2 500 ha de forêts publiques préservées des coupes abusives depuis 2008 par des amoureux de la nature, cette paroi rocheuse, qui aurait abrité des rituels amérindiens à l’époque des migrations des Micmacs et des clandestins fuyant la conscription lors de la Seconde guerre mondiale, serait vieille d’environ 500 millions d’années. Témoignant de la métamorphose des Appalaches, le site dégage un caractère féérique qui lui a rapidement valu son surnom, les traînées vaporeuses de la rivière Blanche laissant parfois suggérer les traits furtifs d’une chevelure de femme.  

Pour les passionnés du lieu, sous la supervision de la corporation de développement local de Saint-Léandre (CDLSL), leurs dix ans d’engagement en faveur de la biodiversité auront été couronnés par l’ouverture, cet été, d’un nouveau sentier libre d’accès plongé dans une cédrière, agrémenté de deux panneaux d’interprétation, sur la loutre de rivière et les milieux humides temporaires. Il débouche sur la fierté de Gérald Tremblay, président de la CDLSL, une passerelle suspendue d’environ 18 mètres, offrant un point de vue imprenable sur une chute d’eau et un canyon sinueux, encastré dans des falaises de grès. Installée à l’automne dernier par Romain Barachko, spécialisé dans le développement de parcours d’arbres en arbres, elle permet d’offrir une nouvelle boucle aux visiteurs et de donner accès à un sentier inédit recouvert de mousse, auquel le ballottement de la rivière qu’il longe apporte une qualité de quiétude inégalée.   

Préoccupé par la pérennité et la conservation des lieux pour les générations à venir, Gérald Tremblay, à qui l’enchantement provoqué par les sentiers avait déjà inspiré son livre « Ekkian, le bossu des collines Chic-Chocs », publié il y a quelques années, a souligné sa fierté du travail accompli aux côtés d’autres bénévoles. Décidé à quitter son poste de président de la CDLSL le 31 décembre prochain, il ne manquera pas néanmoins de continuer à s’investir pour les sentiers de la grotte des fées, dont il juge le rôle fondamental. « C’est un territoire qui bénéficie d’une biodiversité exceptionnelle, avec des paysages de toundra remplis de lichen, des panoramas imprenables sur le patrimoine paysager de la Matanie, des milieux humides préservés des polluants, où peuvent fleurir une grande variété d’espèces, avec aussi la présence d’une faune et d’une flore variées, mentionnées par près d’une trentaine de panneaux d’interprétation. C’est une sorte de ferme forestière qui rappelle que les forêts ne sont pas juste des amoncellements d’arbres mais recèlent bien des trésors, riches de tout un réseau de communication végétale essentiel à l’équilibre de notre planète », s’est-il enthousiasmé en indiquant ses endroits préférés sur le site, parmi les quatre sentiers pédestres totalisant une distance de 7,4 km.  

Grâce au travail des passionnés de plein air s’étant démenés depuis 2008 pour le développement des lieux et leur préservation, les sentiers de la grotte des fées bénéficient d’un statut de protection particulier de la part de Saint-Léandre et les coupes forestières ont été réglementées dans ce secteur, avec le soutien de la MRC. Les différentes personnes impliquées dans le projet s’étaient surtout donné pour mission de lutter pour préserver le plus possible le cadre enchanteur des lieux de la main de l’homme. Leur travail aura porté ses fruits puisque les nouveaux aménagements effectués sur place auront valu aux sentiers de Saint-Léandre de figurer dans le dernier numéro de la revue Rando Québec. Très exalté par les richesses de ce joyau naturel qu’il a contribué à sauvegarder, M. Tremblay n’a pas manqué de rappeler à quel point les lieux lui avaient inspiré plusieurs récits. Les visiteurs, qu’il estime à environ 3 000 par année, sont invités à découvrir les nouveaux développements dès cet été, pour imiter le poète Gérard de Nerval et venir « rêver dans la grotte où nage la sirène ».